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16/02/2016

Histoire d'un flop prévisible

Vu sur le site Toute la culture [ http://toutelaculture.com/cinema/a-laffiche/alone-in-berlin-le-gachis-qui-revolte-la-berlinale/ ] cette chronique d'un film qui semble avoir échoué sur toute la ligne ou presque...

[BERLINALE] « ALONE IN BERLIN » : LE GÂCHIS QUI RÉVOLTE LA BERLINALE

16 février 2016 Par Elie Petit
 
Alone in Berlin, la très attendue adaptation du classique d’Hans Fallada (Jeder stirbt für sich allein en allemand) par le réalisateur Vincent Perez ne fait pas que décevoir. Le gâchis est révoltant, à faire huer une Berlinale, tant le sujet était potentiellement riche.
 

L’histoire est connue : c’est une lettre de la Wehrmacht leur notifiant le décès de leur unique fils Hans sur le Front français au cours de l’été 1940 qui poussent Otto (Brendan Gleeson) et Anna Quangel (Emma Thompson) à entrer dans une résistance silencieuse et solitaire contre le régime qui leur a pris leur enfant. Au risque de leur vie, ils commencent à disperser dans tout Berlin des cartes postales dénonçant le IIIème Reich et son Führer, appelant à stopper « la machine de guerre », à résister et à soutenir la « presse libre ». La SS et la Gestapo recherchent dès lors activement et avec difficulté ces résistants spontanés et discrets, leur espoir principal reposant sur le fait que ces derniers ne commettent une erreur.

Hormis la première scène, la photographie est profondément laide. Le Berlin montré à l’écran a tout du décor carton-pâte. On dirait un Disney, ou une adaptation hollywoodienne sans originalité. Il se dégage, par moment, une sorte de chaleur, presque un bien-être, des rues de la capitale du Reich d’Hitler. Cela aurait pu être un parti pris, controversé, pour représenter la vie quotidienne des allemands sous la dictature nazie. Mais cela ne peut s’apparenter qu’à une malheureuse et crasse maladresse, car rien, ni dans la mise en scène ni dans le texte, ne vient véritablement contraster ces couleurs. Même la représentation de ces deux individus qui semblent retrouver dans cette entreprise suicidaire un nouvel élan amoureux n’y parvient guère non plus. Le sombre désespoir, la folie, moteur de cet acte, manque.

C’est sans doute en voulant mettre ce couple en avant – Perez a affirmé que son film n’était pas politique ni historique, mais « émotionnel » – que le film enchaine les écueils. Tous les autres personnages manquent de profondeur et de cohérence, en particulier les nazis. Dans Alone in Berlin, la structure idéologique du régime totalitaire se résume à peu de chose près à du sadisme, à de l’opportunisme et à de l’obéissance. La société allemande dans le national-socialisme – génialement décrite par Fallada – est tout au plus montrée à partir de signes extérieurs (nombreux drapeaux nazis et saluts hitlériens) qui ne convainquent pas. Les autres enjeux soulevés par ce récit ne sont également pas, peu ou mal traités : peut-on vraiment croire que les deux protagonistes soient réellement animés par des convictions politiques sérieuses ? Qu’est-ce-que signifie résister dans la société civile ? Qu’est ce qu’une société violente et radicalisée ?

Enfin, que dire de l’anglais comme langue utilisée dans le film alors même que la distribution est en partie composée d’acteurs allemands ? Comme l’ont soulevé plusieurs journalistes lors de la conférence de presse de Berlin, la langue ne serait-elle pour Vincent Perez qu’une « variable d’ajustement »? Le réalisateur ne répond pas vraiment à la question, mais se contente d’affirmer qu’il s’agit avant tout par ce moyen « d’amener le film à un niveau international ». Quitte donc à effacer l’identité originale de cette histoire.

Face à un tel ratage et à autant de bêtise, c’est le public qui se sent seul à Berlin. On lui recommandera d’aller plutôt regarder du côté des quatre précédentes adaptations du livre qui ont été tournées depuis les années 60.

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