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29/08/2020

Recension de Vieux Coeur en Voyage (avril 1942)

Nous publions ci-dessous, une recension de Vieux cœur en voyage, par Louis Fournel, parue dans le numéro 74 de l’Union Nouvelle, hebdomadaire d’action pour une France nouvelle dans la nouvelle Europe, du 25 avril 1942.

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LE MOUVEMENT LITTÉRAIRE

VIEUX CŒUR EN VOYAGE par Hans FALLADA

NOUS voici dans un vert jardin, innocente merveille, baignée d’une poésie blancheneigeuse. Avant de pousser la porte de ces féériques espaces où les choses pures font alliance avec la fraîcheur, Alphonse de Châteaubriant célèbre, de lyrique façon, cet enchantement qui perd ses contours pour se fondre en une touchante rêverie. Ce conte bleu, si proche du paradis enfantin, cette miniature médiévale qui a pour titre : « Vieux Cœur en Voyage », a profondément touché un écrivain français de très grande classe.

Hans Fallada, né dans le Mecklembourg aux grandes dunes sablonneuses, aux lacs mélancoliques, a trouvé dans Alphonse de Chateaubriant, chantre des landes fleuries de Bretagne, un introducteur de qualité. “On savait depuis longtemps que l’auteur de « La Réponse du Seigneur » était sensible à la finesse, à l’intelligence, à la musique intime qui se joue au fond des êtres et à la tendre atmosphère baignant les légendes humaines, mais la réalité dépasse notre attente. En quelques pages, Alphonse de Chateaubriand sait toucher l’âme du lecteur et apporter un simple témoignage d’admiration à un confrère remarquablement doué. Écoutez-le plutôt parler de Hans Fallada :

« L’homme qui a écrit ces touchantes pages de rêve est un homme capable, sans s’occuper de l’opinion de ses semblables, de vivre une vie double, capable de s’asseoir à une table, avec un grand pot de tabac et, ayant fermé sa porte, de regarder fixement, pendant un temps qui ns finit pas, dans un beau vide rempli du vol des Anges. Il est poète, poète et poète. Il dit, et tout au long de sa parole, quelque chose de chaud et de douillet se met à grouiller, telle une rumeur agitée de nids d'oiseaux au cœur des buissons. »

Pour employer une comparaison se référant au domaine de l’architecture, l’amusante histoire du professeur Gotthold Kittguss et de sa pupille Rose-Marie Turcke est à deux étages. En marge des querelles et des passions des grandes personnes, nous voyons les enfants se grouper et s’entr’aider de la plus effective façon. Cette chevalerie d’un nouveau genre, qui fait alliance avec une bonté universelle, est une trouvaille bien digne de la lumineuse intelligence de Hans Fallada.

Ce monde mystérieux dans lequel règne une amitié sans contrainte et une pure noblesse d’esprit, n’est point une réplique grossière du monde réel, souille par la haine, l’égoïsme et l’absence de sensibilité. C’est une évasion complète à la faveur nocturne, où chaque nouveau membre serre la main de ses camarades en prononçant le serment : « Moi pour toi, toi pour moi. Vive Unsadel ! »

Peut-être que si de telles ligues se réalisaient, il y aurait sur terre moins d’incompréhension et plus de joie pour lutter contre la laideur et la mort.

Le professeur Kittguss, avec ses cheveux blancs légèrement ondés, son visage pâle et bien rasé, ses yeux bruns au regard doux et lointain, son large chapeau mou et son grand manteau noir, les méchants parents adoptifs de Rose-Marie, le jeune docteur Kimmknirsch et le chien Bello évoquent, comme le dit si poétiquement Alphonse de Chateaubriant, « l’art des Schattengilder (des ombres-images) comme en a dessiné avec tant de talent Rodolf Koch. C’est souvent le, même esprit de finesse dans les silhouettes, le même délicieux réalisme. » Une musique de songe accompagne le poétique dessin animé, aux cent actes divers, imaginé par Hans Fallada.

Après de multiples aventures, tous les amis de Rose-Marie se retrouvent dans une maison, au bord d’un lac tranquille. Toutes les terreurs du passé sont à jamais défuntes et la vie se colore de tendresse et d’amour pour la délicieuse héroïne de ce conte couleur du temps et de l’amitié.

On ne saurait trop louer Mme Edith Vincent d’avoir mis au service de Hans Fallada ses dons d’élégance et de compréhension. Le lecteur français est sensible à ce travail qui, tout en respectant la saveur intérieure d’une œuvre brillante, lui offre avec une suprême fidélité, des pages aimables qu’il est bon de ne pas ignorer.

Louis FOURNEL

« Vieux Cœur en Voyage », par Hans Fallada, traduit de l’allemand par Edith Vincent. Introduction d’Alphonse de Chateaubriant. Edition Fernand Sorlot.

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